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Le Dr Michel Desrosiers, omnipraticien et avocat, est directeur des Affaires professionnelles à la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. |
Certains événements malheureux survenus le plus souvent dans des urgences hospitalières ont donné lieu à une grande couverture médiatique. Que ce soit en raison du traitement par le personnel, des soins reçus ou du temps d’attente pour être vu, ces événements ont eu des conséquences qui vont bien au-delà des personnes en cause ou de leurs familles. On peut comprendre la méfiance vécue par les membres de ces communautés à l’égard des établissements de santé.
Lorsque les soins requis nécessitent de l’équipement spécialisé ou un plateau technique, comme une unité de soins intensifs ou un bloc opératoire, il existe peu de solutions de rechange. Toutefois, l’accès à des soins de première ligne peut favoriser la prévention et ainsi réduire le recours incontournable aux hôpitaux. Il y a différentes options.
Sur les réserves, les communautés disposent généralement de centres de santé financés par le gouvernement fédéral. Elles en prévoient le fonctionnement et y offrent les services qu’elles jugent nécessaires pour leurs membres. En plus de prodiguer des services médicaux, ces centres peuvent proposer des services de santé mentale, du soutien spirituel et des soins traditionnels, en plus de l’accompagnement pour se retrouver dans le système public, le cas échéant.
Cependant, bon nombre d’Autochtones n’habitent pas sur des réserves, mais bien dans des villes ou des villages. Une association fait la promotion de ressources adaptées à leurs besoins dans différentes municipalités. Il s’agit du Regroupement des centres d’amitié autochtone. D’autres associations mettent sur pied des ressources comparables sans faire partie du regroupement. La philosophie y est néanmoins la même, soit offrir des services adaptés aux membres des communautés autochtones qui habitent hors réserve.
Des médecins qui connaissent bien les valeurs de ces communautés et leur approche des soins de santé souhaitent souvent pratiquer dans ces centres. On ne parle pas de grosses cliniques médicales offrant des services sur rendez-vous et sans rendez-vous sept jours sur sept. Les services médicaux peuvent être limités à une ou deux demi-journées par semaine. D’autres services complémentaires peuvent y être proposés : interprètes, navigateurs dans le système de santé, guérisseurs traditionnels, cercles de guérison, thérapie par l’art, éducation en santé avec la participation d’aînés, psychologues et travailleurs sociaux. Ces services complémentaires n’exigent pas la participation des médecins. Par ailleurs, l’accueil et le décor sont adaptés aux communautés desservies. Il va sans dire que ces milieux ne sont pas dans des installations traditionnelles, mais plutôt dans des maisons ou des locaux loués, facilement accessibles et se démarquant du CLSC ou d’un autre lieu comparable. Les médecins qui y exercent n’y paient habituellement pas de loyer ni d’autres frais.
Les médecins n’offrent en général pas de consultations sans rendez-vous, et les consultations peuvent prendre plus de temps que dans une pratique plus classique. Les patients ne veulent pas nécessairement s’inscrire auprès des médecins, car ils peuvent séjourner en ville de façon temporaire ou pour d’autres raisons. Et les médecins peuvent devoir échanger avec d’autres membres de l’équipe de soins pour comprendre ou communiquer les besoins des patients ou pour convenir d’interventions adaptées. Comme la pratique des médecins ressemble dans une certaine mesure à celle en CLSC, ces derniers demandent souvent d’avoir accès à la rémunération à tarif horaire comme en CLSC.
Afin d’éviter des accords spécifiques pour chaque milieu, la récente lettre d’entente 390 simplifie beaucoup le processus. Un accord peut demeurer nécessaire lorsque le milieu ne fait pas partie des centres d’amitié du regroupement, mais il s’agit plus de l’exception que de la règle.
Des centres d’amitié autochtone offrent des services adaptés aux membres de ces communautés dans des villes ou villages hors réserve.
Pour se prévaloir de la lettre d’entente, le milieu doit d’abord en faire la demande au comité paritaire, décrire son offre de service et l’horaire clinique des médecins. Le comité paritaire désigne alors le milieu, ce qui donne ouverture aux modalités de rémunération applicables en CLSC. Chaque médecin doit par la suite choisir son mode de rémunération et informer le comité paritaire de sa date de début et de son choix, que le comité indiquera à la RAMQ. Lorsque le médecin quitte un milieu, il doit avertir le comité paritaire afin de mettre fin à son avis de nomination.
Du fait des particularités que nous avons déjà décrites de la pratique dans ces milieux, les médecins optent essentiellement pour le tarif horaire (qui ne fait pas l’objet de primes). Et la rémunération des activités médico-administratives n’y est pas possible, car comme les médecins ne sont pas en établissement, il n’y a pas de réunions de CMDP, de service ou de département. Les majorations en horaire défavorable, comme la rémunération différentiée en région, s’y appliquent par ailleurs.
Les autres éléments de l’Entente particulière sur la prise en charge et le suivi sont accessibles. La clientèle couverte par l’Entente particulière sur le Nunavik et les Terres Cris ne peut pas s’inscrire, car la formule de rémunération prévue dans cette entente a été établie comme si l’ensemble de la clientèle était inscrite.
Il est aussi possible pour un tel milieu de se joindre à un GMF. Pour l’instant, aucun ne semble l’avoir fait. Enfin, ces milieux peuvent être intéressants pour les résidents. Les modalités de rémunération de la supervision s’y appliquent (demi-per-diem de supervision). Il est toutefois nécessaire de faire désigner le milieu à cette fin pour pouvoir les facturer. Les modalités de la section II de l’Entente particulière sur les médecins enseignants ne sont cependant pas accessibles. Les médecins de ces milieux ne peuvent donc pas se prévaloir du mode mixte applicable en GMF-U.
À tarif horaire, la facturation se trouve donc simplifiée. Il suffit d’indiquer le numéro attribué à l’établissement et le code d’activité (habituellement le 002030). La facturation se fait dans l’application en ligne de la RAMQ, et le cosignataire est généralement le directeur ou la directrice du centre. La transmission de la demande d’honoraires se fait par les moyens habituels.
Espérons que ces modalités favoriseront la participation des médecins de famille à l’offre de soins à ces populations. Bonne facturation !
Une lettre d’entente a récemment été convenue pour faciliter l’accès au tarif horaire dans les centres d’amitié autochtone.